Aliette Guibert on Tue, 5 Nov 2013 14:57:55 +0100 (CET)


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[Nettime-fr] Tripoli International Film Festival 2013 November 14-19 Souveraineté culturelle


Tripoli International Film Festival 2013 November 14-19 Souveraineté culturelle

mardi 5 novembre 2013, par Aliette G. Certhoux, Jocelyne Saab (filmmaker statement, images credit)

 « Les interactions de ce monde je ne les connais pas je ne sais que les décrire les observer j’ai la capacité de sentir sous la plume crisser la chaleur ou la circulation invraisemblable imposée stupéfiante et quelquefois mortelle. Je reconnais dans des écrits passés la disparition de ce que vu, aimé, où j’ai appris à vivre, et cette insulte au peuple dont je suis me radicalise dans des positions forcément nettes. »
Christophe Huysman, Les chemins de Damas
 “A movement is a displacement of a point of view. The persistence of singularities is most obvious in the sensory overload. Fugue states are places where layers of recursion persist. In the most desolate locale, or in the dense visual fields of paintings hung side by side.....in these extremes, at least, the fugue state arises.”
Christina McPhee, Fugue State
 “Of course, for the Americans, the telling conceptual design piece at the moment is the 3D printable gun. But for us, maybe a 3D printed Guy Debord asks more pertinent questions, about where free culture is not in the twenty-first century. I got some negative commentary from the pro-situ crowd—they still exist. Debord is a bit sacred to them. I have to admit, when somebody suggested turning the design into a candy dispenser even I thought some boundary was being crossed.”
McKenzie Wark, Millennium Candies
 « Vers d’autres trajectoires inachevées, vestiges d’autres temps superposés, always out of joint, déconnectés dans l’immensité d’un parcours qui recommence, nouvelles lignes de fuite après quelques impasses sinueuses et indociles, tracés aux allures de gravures ou d’esquisses insolites. »


Du jeudi 14 au mardi 19 novembre 2013, au Liban, aura lieu le premier opus de l’événement Tripoli International Film Festival, pensé, imaginé, et dirigé par Jocelyne Saab à laquelle il a été confié par l’association qui l’organise, entourée de personnalités libanaises et françaises et d’une équipe de jeunes artistes et techniciens, formidables, et qu’elle a décidé de dédier à la résistance culturelle, face à la résistance armée qui gronde à tous les carrefours du Proche Orient tandis que le cinéma résiste. Elle a choisi le cinéma émergent du Proche Orient, de l’Asie, de l’Asie de l’est, et de l’Inde.

Olivier Hadouchi, dans ses Carnets dédiés de Criticalsecret [1], nous a instruits à travers le plaisir de le publier, et honorés par plusieurs de ses grands entretiens avec des cinéastes singuliers de la résistance. D’abord dans leur propre capacité de vivre au milieu du chaos ou d’en réchapper, par leur œuvre même ils symbolisent la « résistance culturelle », (nom magique de l’association qui organise ce festival, cet aphorisme en deux mots dit tout de son objet c’est-à-dire rien de ce qu’il en est attendu au delà du moyen qu’il procure ; donc c’est un leurre ; mais ce n’est pas un mensonge, tout au contraire la chose si parfaite et d’abord imprévisible qu’on ne peut la nommer, pour qu’elle ait une chance d’exister, rose absente de tout bouquet, pas l’utopie mais la vie en temps réel), et qu’on pourrait penser à tort conjointe de la résistance armée, parce qu’il a pu lui arriver de l’accompagner. Du moins faire un bout de chemin avec elle puis la quitter sans trahir les amis. En fait, la résistance culturelle mène son petit chemin elle-même. C’est la leçon de Mario Handler, c’est la leçon de Jocelyne Saab, les deux stars/non stars des entretiens qu’il nous a offerts.

La résistance culturelle ce n’est pas l’arme propagande, ni hurler les mots d’ordre. Pourtant « Résistance Culturelle » paraît en être un, mais c’est un leurre il vaut pour ce qu’il cache, ce qui est indescriptible, incroyable, la vie même comment elle se coopte à plusieurs devenant pensée de toutes les pensées. Ce n’est pas un mot d’ordre c’est un oriflamme, un drapeau de ralliement empathique. En quoi les graphistes qui entourent Jocelyne Saab communiquent une sensibilité graphique particulièrement intéressante sur son projet. Une certitude internationale : seule la résistance culturelle parce qu’elle est pacifique et la culture attaquée de toutes parts par les armes et par les sociétés telles qu’elles sont devenues, partout dans le monde, peut vaincre, parce que son lieu loin de la propagande est la sérendipité, l’aléatoire, contre la fatalité.

En réalité, cet aphorisme surgit en puissance d’autant plus grande quand la guerre mène clairement à une impasse : c’est le cas actuel de la guerre en Syrie et des tentatives de l’exporter de l’autre côté de la frontière, dans une des villes déchirées par l’ancienne guerre libanaise.

Quand toute autre résistance, armée inclus, devient impossible, à cause des circonstances : répression totale, dernier combattant tombant sur le champ de bataille, catastrophes naturelles, ou accidentelles... Alors on ne va pas chercher la culture parce qu’elle vient à nous, elle s’impose à la vie, quand la vie émerge de son combat avec la mort.

Elle surgit à la conscience sous la forme d’un désir d’inventer un langage qui parle de nouvelles choses, non comme une mémoire de ce qu’il faudrait reconstruire, mais comme une chose nouvelle d’innover à produire autrement à chaque instant, quand la mémoire est traumatisme. Ainsi la résistance culturelle permet-elle à la mémoire de retrouver son calme.

La résistance culturelle c’est décider de combattre la répétition automatique du choc, soudain avoir une lueur, pouvoir réfléchir à ce qui s’est passé juste avant, et juste après que le choc se soit produit. Non se replier sur la tradition mais chercher l’émergence dans l’ouverture, métamorphoser ce qu’il reste dans ce qui nous arrive plus loin, de ce qui nous parvient de loin pour nous faire penser, aimer encore et innover encore de danser, — danser contre la guerre — plus bruyamment que le bruit de la guerre, et d’être les plus nombreux possibles à danser contre la guerre — le public quand il ressent le cinéma.

Le cinéma comme forme de combat, media des témoignages, et comme lumière sensible du temps, est une arme pacifique extrêmement puissante quand elle cherche la vie parmi la mort ou un monde hostile, plutôt que prouver quelque chose. Notamment le cinéma de Jocelyne Saab paraît toujours à l’affut de la vie sensible dans le jour même, par rapport à la mémoire du jour précédent, avec la vision du ciel incertain des jours futurs, sur le chemin desquels pourtant chaque moment sera à inventer pour créer le renouvellement des possibilités de la vie... C’est une femme visionnaire.

Nous l’avons découverte dans sa passion, son énergie, sa beauté faite de grâce et d’élégance, artiste contemporaine et cinéaste documentariste et de fiction, pendant que le public parisien dont nous étions pouvait voir son œuvre filmique à la Cinémathèque française, grâce à un hommage organisé par Nicole Brenez, qui sera présente à Beyrouth.

Aujourd’hui, elle innove le commissariat du programme du festival avec une association qu’elle a co-fondée pour résister — pour que le Liban culturellement résiste à travers le monde qu’il convoque. Par son titre même citant Tripoli, la ville libanaise qu’elle dit trois fois millénaire, mais pourtant toujours accablée par l’imminence d’une guerre, où un immense pôle urbain postmoderne entrepris par l’architecte brésilien Niemeyer resta inachevé, ayant cessé de se construire quand l’entour commençait à se détruire... Les ruines autrement. Pourrons-nous aller à Tripoli ?

Qu’importe, tout aura lieu.

Construire, détruire, construire, penser le monde à travers l’art filmique qui le transforme, c’est aussi le défi féministe de Jocelyne Saab dans un Liban qui refuse l’éternité fatale de la guerre et résiste par la personnalité de quelques femmes à l’entropie de la misogynie communautariste.

On pense à la fluidité des genres des dieux et des déesses antiques qui poursuivent d’inspirer les mouvements de celles autour desquelles nous aimons nous rassembler.

Non seulement penser son propre cinéma mais penser son cinéma parmi le cinéma des autres cinéastes et les rassembler pour leur gloire, avec le même courage héroïque, et la même grâce poétiques dans l’art de convoquer les talents par le sien propre. Cette magie du cinéma, est à la fois séduction et ancrée dans un pragmatisme que seuls les cinéastes qui se sont confrontés au grand reportage ou à des tournages de films de fiction, dans des pays aussi déchirés que ceux où Jocelyne Saab a tourné, ou réalisé, ou encore ceux que de trop grandes ambitions ont précipité vers leur propre destruction mais qui ont su en réchapper pour poursuivre de filmer ce qu’ils avaient dans la tête, ou ce que soudain ils voyaient sous un autre jour, après les bombes, entre deux dictatures, sous l’œil du vautour, en dépit de la déception.

Sous les chemtrails partout c’est la guerre.

L’ironie critique du cinéma est antho-ontologique : ce n’est pas tant de crier des mots d’ordre de la résistance que mais d’en signer le geste, de signifier de fait le monde, tandis que des pouvoirs s’acharnent à le faire disparaître ; c’est-à-dire tout au contraire, et par nature, le révéler. C’est donc l’empêcher de disparaître, c’est-à-dire à les gêner, à les empêcher en quelque sorte sans le vouloir dans leurs desseins. La résistance culturelle, c’est quand le cinéma s’échappe à lui-même, quand il devient plus fort que lui. C’est la souveraineté culturelle, l’ombre d’Athena.

A. G. C.


Olivier Hadouchi, Jocelyne Saab, traduits par Christina McPhee
#OlivierHadouchi Conversations avec la cinéaste Jocelyne Saab / Several conversations with filmmaker Jocelyn Saab


- Information du programme (suivre le lien).


Lire la note d'intention de la directrice artistique et commissaire du festival :http://www.criticalsecret.net/tripoli-international-film-festival-2013-november-14-19-souverainete-culturelle,134.html


 Le blog in progress du festival (dérouler les menus)
http://culturalresistance.org/

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Tripoli International Film Festival / 2013 November 14-19
LE POSTER

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Voir en ligne : LE BLOG DU FESTIVAL (DÉROULER LES MENUS)


  • Tripoli International Film Festival - Teaser (1124 x 576) (QuickTime – 3.6 Mo)

    Entre les barbelés d’après une idée de Elsa Mehanna, le teaser est dessiné par Walid Aouni auteur du graphisme thématique des têtes de la matière grise qui pense, et la réalisation (mise en image, animation) ainsi que le montage, sont de Marwan Ziade.

Notes

[1] 2013 OLIVIER HADOUCHI @ Carnet de mars-avril_Notebooks of March/April.




Animatrice, éditorialiste, directrice des éditions
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